8 mars 2023 - A la rencontre des femmes emprisonnées à Lille-Sequedin
Le 8 mars dernier, Mme Nathalie Van Vliet, membre du conseil d'administration de l'ANVP s'est rendue à la Maison d'arrêt des Femme de Lille Sequedin avec Mme Violette Spillebout, députée Renaissance de la 9ème circonscription et Mr Laurent Méreau, bâtonnier de Lille.
La presse locale (Voix du Nord) s’en est fait l’écho dans ses pages (réservées aux abonnés) :
La députée Violette Spillebout à la rencontre des femmes emprisonnées à Lille-Sequedin
Seules deux prisons accueillent des femmes dans le Nord – Pas-de-Calais. À l’occasion de la Journée des droits de la femme, la députée Violette Spillebout a visité celle de Lille-Sequedin.
La députée Violette Spillebout a visité ce mercredi le quartier femmes de la prison de Lille-Sequedin, pour se rendre compte des conditions des détenues. «Le sujet du lien à l’enfant me questionne beaucoup. C’est un point sur lequel je veux être vigilante», réagissait Violette Spillebout, à l’issue de sa visite.
Ce n’est pas le genre de séparation qu’on imagine quand on est maman : laisser son enfant de 18 mois. C’est ce que va vivre dans quelques jours celle que nous appellerons Hélène (1), incarcérée à Sequedin pour « une lourde peine ». Son fils, qui a grandi dans cet univers si étrange, va quitter la prison. « Je lui ai dit que c’est au tour de son père de prendre le relais. Je sais que cela va être dur, que je vais rater les moments importants. Mais je me prépare depuis qu’il est né. » Hélène pourra voir son fils lors des parloirs une fois par semaine.
La maison d’arrêt de Sequedin est l’une des rares prisons de France (elles sont 32) à disposer d’une nursery. Un ensemble de cinq cellules attenantes à une grande pièce colorée avec plein de jouets et même une petite cour bétonnée ceinturée de grilles. « Un enfant peut rester au maximum jusqu’à ses 18 mois. Après on considère que pour son développement, c’est mieux qu’il soit ailleurs. C’est 24 mois, sur dérogation », explique Mathieu Dangoisse, directeur adjoint de la prison.
« Je suis sortie de la prison pour accoucher. J’ai passé une semaine avec mon bébé puis je suis revenue »
Hélène s’est rendu compte en détention qu’elle était enceinte. « Au début, je me suis inquiétée. Mais ici, on a tout ce qu’il faut. Bien sûr, je préférerais être dehors mais je n’ai pas à me plaindre. » Elle suit des études en distanciel et, dit-elle, « je vais plonger la tête dedans pour ne pas penser à la séparation ». Sur sa hanche, son garçonnet fait des « checks » avec son petit poing à tout le monde et notamment à la députée.
Comment garder le lien mère-enfant ?
Les liens mères-enfants, c’est ce qui a retenu l’attention de Violette Spillebout, la députée lilloise qui visitait pour la première fois un établissement pénitentiaire, en compagnie du bâtonnier de Lille, Florent Méreau. Le sujet est complexe. Pour certaines détenues, les enfants sont retirés juste après la naissance, sur décision de justice. « Je suis sortie de la prison pour accoucher. J’ai passé une semaine avec mon bébé puis je suis revenue », raconte Jessica (1). Violette Spillebout laisse passer un silence. « Une semaine ? » « Oui, c’est très dur », ravale la femme.
Et après ? D’après le directeur-adjoint, « quand l’enfant est chez la famille, emmené par elle, ça se passe plutôt bien » (2). Avec un bémol par rapport aux hommes : les femmes étant bien moins nombreuses en prison, il y a moins d’établissements (seulement deux dans le Nord – Pas-de-Calais : Sequedin et Bapaume) et les femmes sont souvent plus éloignées de leur famille.
Et puis, quand l’enfant est placé, en revanche, les choses semblent plus compliquées, « du fait des difficultés administratives, rapporte Mathieu Dangoisse. Mais nous menons actuellement un travail important dessus ».
(1) Prénoms d’emprunt. (2) Le centre pénitentiaire dispose d’espaces dédiés pour les rencontres des familles.
L’avis de Nathalie Van Vliet, visiteuse
Les parlementaires ont le droit visiter, à tout moment, les établissements pénitentiaires. Pour sa part, la députée Violette Spillebout avait prévenu de sa visite, organisée par le bâtonnier de Lille.
Nathalie Van Vliet, membre de l’association ANVP (association nationale des visiteurs de personnes aux mains de la justice) était également conviée. Vingt-deux bénévoles de cette association interviennent, en venant discuter avec des détenus : « Ce sont souvent des détenus qui veulent discuter pour des raisons très variées. Je trouve cela très important que des députés viennent. On dit tant de choses sur l’incarcération, c’est important que les élus viennent observer, même si on leur montre ce qu’on veut bien leur montrer. »
Visite de la prison de Lille-Sequedin: «Chez les femmes, la surpopulation n’est pas un sujet»
La visite de la députée Violette Spillebout, mercredi à la prison de Lille-Sequedin, dans le cadre de la Journée des droits des femmes, a été l’occasion d’aborder la surpopulation. « Ce n’est pas un sujet chez les femmes », explique l’administration pénitentiaire.
Les conditions de détention des femmes sont « à des années lumière de celles des hommes », ont expliqué ce mercredi les responsables de la Maison d’arrêt des femmes. Pour une raison simple : « La surpopulation n’est pas un sujet », résume Mathieu Dangoisse, directeur adjoint.
Aujourd’hui, chez les hommes, Sequedin est à 160 % de sa capacité (647 hommes y sont actuellement incarcérés). Des matelas doivent être installés par terre dans une quinzaine de cellules, où les hommes sont déjà deux.
« Le seul point commun entre les hommes et les femmes, c’est la toxicomanie »
Rien de tout cela dans le quartier des femmes, où 123 personnes sont actuellement en détention pour une capacité théorique de 149 places (capacité qui pourrait être encore plus grande, en cas d’accueil de deux personnes par cellule). Aujourd’hui, les femmes ont toutes une cellule individuelle, à quelques exceptions près. « Certaines demandent à être à deux pour rompre la solitude », explique Tony Malarmé, responsable adjoint de la MAF. Les nouvelles arrivantes sont aussi à deux (ici, il s’agit plus de prévention au suicide).
Beaucoup moins d’incidents
Cause ou conséquence, l’ambiance n’est pas la même. C’est ce que décrit Tony Malarmé, responsable adjoint, lors de la visite ce mercredi : « C’est calme mais ce n’est pas parce que vous êtes là. C’est toujours comme ça. Si je vais sur la promenade des hommes, je vais me faire insulter de tous les noms. Chez les femmes, depuis quatre ans, je n’ai jamais connu un mot plus haut que l’autre. Mais on a le temps. Je fais une dizaine d’audiences par jour. On fait davantage un travail de fond chez les femmes. Chez les hommes, c’est impossible. »
Ce mercredi, la députée Violette Spillebout et le bâtonnier de Lille, Florent Méreau, ont aussi pu visiter les quatre cellules du quartier disciplinaire. Un lit et un bureau scellés au sol dans un espace étriqué et angoissant. Mais vide, ce mercredi. « Le seul point commun entre les hommes et les femmes, c’est la toxicomanie, aussi présente. Mais il y a beaucoup moins d’agressions et d’incidents chez les femmes », relate le directeur adjoint, Mathieu Dangoisse.
« C’est peut-être une question naïve, mais ne serait-il pas possible de transférer des hommes chez les femmes s’il y a de la place ? », a demandé Violette Spillebout. « Trop compliqué d’un point de vue organisation. »
Hommes et femmes se croisent-ils?
Si les femmes peuvent être surveillantes de la maison d’arrêt des hommes, l’inverse n’est pas possible : les hommes (hormis les gradés) ne peuvent pas surveiller les femmes. À Sequedin, il y a en moyenne chaque jour quatre surveillantes et un ou une gradé(e) pour le quartier des femmes (125 personnes).
Sinon, femmes et hommes peuvent-ils se croiser ? Les détenus sont strictement séparés – « Il n’y a aucune perméabilité », note le directeur adjoint –, mais ils peuvent se retrouver au cours de certaines activités, comme des activités journal, sport ou opéra.
Un étage «Respect» chez les femmes
Sur chacune des portes, des affiches personnalisées marquent l’identité de celle qui dort là : « Auxi bibliothèque », « Auxi coiffeuse ». Ici, les femmes vont et viennent à leur travail ou leur activité, la clé de leur cellule… dans leur poche. C’est une spécificité de la maison d’arrêt des femmes de Sequedin : proposer un quartier Respect, qui a été mis en place il y a plusieurs années, inspiré d’une pratique espagnole. « Comme on n’est pas en surpopulation, on peut le faire chez les femmes », ont expliqué les responsables de la prison à la députée.
Situé au deuxième étage, il s’adresse seulement à 27 femmes, sur 125 détenues. C’est clairement une récompense de bons comportements. Ici, les allées et venues sont libres en journée (ouverture des portes à 8 h 30 et fermeture à 17 h 30). En journée, les détenues sont « auxiliaires » pour servir le repas, faire le ménage, s’occuper du salon de coiffure, etc. « Cela apaise et cela responsabilise », met en avant Tony Malarmé, responsable adjoint du quartier des femmes.
ANVP et Administration pénitentiaire
15/03/2023